De
jessicaparkerLe 21/11/24 à 17:34:14
Chapitre 4 « au point où on en est »
Le Cardinal Pougne, le visage marqué par la fatigue, s’effondra presque sur son bureau en soupirant. Malgré son épuisement, il décida de poursuivre les consultations.
— Faites entrer Defaitus, murmura-t-il d’une voix lasse.
La porte s’ouvrit doucement, laissant apparaître Defaitus dans un accoutrement improbable : une robe à pois géante, une perruque rose et des lunettes en forme d’étoiles. Elle avançait avec un sourire éclatant, comme si la situation ne relevait que de l’amusement.
— Bonjour Cardinal ! s’exclama-t-elle joyeusement en prenant place sans attendre d’y être invitée.
Pougne la fixa, incrédule, avant de poser les coudes sur son bureau et de joindre ses mains.
— Bien, commençons. Pourquoi diable vous présentez-vous aux législatives?? Vous n’avez aucune raison d’y participer.
Defaitus leva un sourcil et répondit du tac au tac, sur un ton presque enfantin :
— Parce que c’est rigolo.
Un silence lourd s’installa. Pougne la dévisagea longuement, comme s’il avait mal entendu.
— Rigolo ? répéta-t-il, sa voix tremblante d’exaspération. Vous savez que les législatives ne sont pas un spectacle comique, n’est-ce pas??
— Oh, mais si?! rétorqua-t-elle en croisant les bras. Tout le monde se déguise, les gens applaudissent, et puis… j’aime bien rigoler.
Pougne se massa les tempes, sentant la migraine monter.
— Très bien, enchaîna-t-il pour ne pas perdre patience. Et pourquoi plusieurs circonscriptions?? Montpellier, Paris, Strasbourg… Pourquoi vous présentez-vous dans autant d’endroits?? Et pourquoi déguisée??
Defaitus ajusta ses lunettes en forme d’étoiles et répondit, toujours sur un ton léger :
— Parce que c’est rigolo !
Pougne, abasourdi, ouvrit la bouche pour répliquer, mais aucun mot ne lui vint. Il se passa une main sur le visage et prit une profonde inspiration avant de tenter une dernière question :
— Vous réalisez que vous ne pouvez pas devenir présidente simplement en battant Patou aux législatives ? Vous êtes consciente que cela n’a aucun sens??
Un sourire malicieux illumina le visage de Defaitus.
— Ah, mais si ! Si je bats Patou, je deviens présidente, c’est évident. C’est comme ça que ça marche.
Pougne sentit ses nerfs lâcher. Il se leva brusquement, son fauteuil raclant le sol.
— Non?! Ce n’est absolument pas comme ça que ça fonctionne?! Vous… vous êtes complètement folle?!
Defaitus, imperturbable, haussa les épaules.
— Eh bien, on verra bien. En tout cas, ça sera rigolo.
Pougne, au bord de l’explosion, la pointa du doigt en direction de la porte.
— Sortez?! Tout de suite?! Et reprenez votre sérieux avant que cette mascarade ne devienne un désastre total?!
Defaitus se leva avec nonchalance, adressa un clin d’œil au Cardinal, et s’éloigna en fredonnant une chanson de cirque.
Lorsque la porte se referma derrière elle, Pougne s’effondra dans son fauteuil, une main sur le cœur, l’autre tremblante.
— Ils vont tous nous enterrer… murmura-t-il dans un souffle.
Le Cardinal Pougne leva un sourcil en voyant entrer le Marquis Diesel de St-Étienne, chef autoproclamé du Front des Couillons. L’homme, d’une élégance rare, portait un costume trois-pièces parfaitement taillé, complété par une épingle en diamant scintillant sur sa cravate. Chaque geste semblait chorégraphié, et son entrée ressemblait plus à celle d’un acteur montant sur scène qu’à un homme politique convoqué pour des explications.
Pougne, déjà las de cette journée, sentit sa patience s’effriter davantage. Il se passa une main sur le visage avant de lancer, d’un ton sec :
— Marquis, pourquoi vous présentez-vous aux législatives ? Vous n’avez jamais caché votre aversion pour la démocratie.
Le Marquis esquissa un sourire, se redressa, et répondit avec un léger accent affecté :
— Mon cher Cardinal, la démocratie est une aberration, une insulte à l’ordre naturel des choses. Elle n’a jamais été qu’un carnaval grotesque où la populace élit ses propres bourreaux. Mais voyez-vous, j’ai décidé de jouer le jeu… Pour mieux le subvertir.
Pougne haussa un sourcil, incrédule.
— Subvertir la démocratie… en vous faisant élire ?
Le Marquis posa délicatement une main sur son torse, comme s’il venait de recevoir un compliment.
— Exactement ! Quel meilleur moyen de montrer l’ineptie de ce système que d’y participer ? Et puis, soyons honnêtes, ce Parlement a besoin d’un peu de classe, non ?
Pougne grogna, mais décida de ne pas s’attarder sur l’absurdité de cette réponse.
— Très bien… Mais alors, pourquoi Bordeaux ? Vous êtes de Lyon. Pourquoi ne pas vous présenter dans votre propre région ?
Le Marquis pencha légèrement la tête, l’air faussement amusé.
— Bordeaux, Cardinal, c’est une ville qui a du goût. Des vignobles, une architecture splendide, et surtout, une population qui comprend la valeur des bonnes manières. Contrairement à Lyon, où… disons-le franchement… on trouve bien trop de roturiers bruyants.
Pougne resta sans voix pendant un instant, partagé entre l’agacement et l’amusement.
— Donc, si je comprends bien, vous avez choisi Bordeaux pour des raisons… esthétiques ?
Le Marquis inclina la tête, satisfait.
— Absolument, Monseigneur. Et pour leur vin. Vous savez, si je dois siéger dans ce Parlement ridicule, autant avoir un pied-à-terre dans une région civilisée.
Le Cardinal inspira profondément, cherchant à retrouver son calme.
— Marquis, une dernière question : avez-vous d’autres circonscriptions en vue ? Ou d’autres idées farfelues que je devrais anticiper ?
Le Marquis fit mine de réfléchir, tapotant son menton d’un doigt.
— Eh bien, je pensais aussi à Versailles… ou à Saint-Tropez. Mais ne vous inquiétez pas, Cardinal, je reste toujours fidèle à ma devise : le trône ou rien.
Pougne n’en pouvait plus. Il leva les yeux au ciel, puis se tourna vers PierreSansValeur, debout dans un coin de la pièce.
— Note dans son dossier : “sujet désespérant”.
Le Marquis, ignorant royalement l’exaspération de son interlocuteur, se leva avec un sourire éclatant, salua théâtralement, et quitta la pièce en lançant :
— À bientôt, Monseigneur. Et souvenez-vous, vive le roi !
Une fois la porte refermée, Pougne se laissa tomber dans son fauteuil, massant ses tempes.
PierreSansValeur toussota , l’air préoccupé.
— Bon, je voulais pas vous contrarier, mais nous avons un autre problème.
Pougne, bien fatigué de toutes ces nouvelles inquiétantes, leva les yeux au ciel.
— Au point où on en est… quoi encore ?
PierreSansValeur prit une grande inspiration, comme s’il allait annoncer une catastrophe mondiale.
— Voilà… C’est Gargamel.
Pougne, élevant un sourcil perplexe, laissa échapper un soupir.
— Quoi ? Il est candidat aussi, celui-là ?
PierreSansValeur hocha la tête, visiblement frustré par cette situation absurde.
— Alors, avec tous ces déguisements, on peut être sûr de rien, mais ce n’est pas le sujet. Vous vous souvenez qu’on l’avait envoyé se mettre au vert, au Havre ?
Pougne, déjà fatigué par cette avalanche de problèmes, fronça les sourcils.
— Oui… Et ?
PierreSansValeur prit un air grave.
— Bah, il s’est fait épingler par un journaliste avec un salaire de 411k.
Pougne, abasourdi, éclata presque de rire, mais se ravisa.
— Mais… pourquoi faire un salaire aussi exorbitant ?!
PierreSansValeur, l’air fataliste, haussant les épaules comme si cela n’avait pas de sens.
— Alors ça… personne n’a jamais rien compris à ce fou.
Pougne, en secouant la tête, se demanda une fois de plus dans quelle folie il avait mis les pieds.